« Convaincre les grands, c'est comme vouloir qu'un chewing-gum mâchouillé une heure conserve son goût du début »
Quatre sœurs (BD) de Cati Baur
D'après les romans de Malika Ferdjoukh (École des loisirs)
Volume 1 : Enid
Volume 2 : Hortense
Rue de Sèvres / janvier 2014 / 150 pages / 15 euros (même si l'éditeur brouille les pistes, il s'agit d'une réédition de 2011, du moins pour le tome 1)
Je n'ai jamais lu Quatre sœurs de Malika Ferdjoukh et donc, je découvre les 5 frangines Verdelaine avec ces deux magnifiques bandes dessinées (*depuis, je me suis renseignée auprès des élèves-fans et il s'avère qu'il s'agit d'une adaptation à l'identique des romans *). Les deux derniers tomes (t.3 : Bettina et t.4 : Geneviève) sont encore à venir mais cette série est d'ors et déjà un véritable coup de cœur !
A l'extérieur, les éléments sont déchaînés sur le petit bout de falaise où se tient la Vill'Hervé la maison des Verdelaine, dans l'impasse de l'Atlantique, « au bout du bout ». Mais à l'intérieur, ça grouille aussi de vie ! Il y a les 5 sœurs Verdelaine, orphelines depuis la mort de leurs parents : Enid l'aventurière naïve (9 ans), Hortense la romancière timide (11 ans), Bettina la peste obsédée par les garçons (14 ans), la plantureuse et maternelle Geneviève (16 ans) et enfin, Charlie celle qui, du haut de ses 23 ans, fait bouillir la marmite. Ah ! Et il ne faut pas oublier Basile, l'amoureux transi de Charlie, les fantômes des parents (auxquels chaque sœur parle régulièrement sans se douter que les autres en font autant !), les chats, la chauve-souris d'Enid, le rat Mycroft … et parfois, l'horrible tante Lucrèce.
J'ai adoré l'ambiance de douce folie qui baigne le tome 1, Enid. C'est l'automne, l'époque des bottes en caoutchouc, des tempêtes, d'Halloween et du gâteau aux noix de Geneviève. Enid est la petite dernière qui fourre son coquin nez partout. Casse-cou intrépide mais impressionnable, elle pense que le bois de la Vill'Hervé est hanté et n'aura de cesse découvrir pourquoi. Le train-train quotidien des sœurs est également bousculé par l'arrivée de la pimpante Colombe, qui va provoquer la jalousie féroce de Bettina.
Le tome 2, Hortense, parce qu'il évoque des thèmes plus sensibles comme la maladie, le deuil des parents ou la difficulté à trouver sa place dans une fratrie nombreuse, est plus mélancolique (tout en restant très drôle). C'est l'hiver et la réservée Hortense tisse une amitié avec Muguette, qui semble être la seule à la comprendre. Contre tout attente, Hortense s'inscrit à un cours de théâtre : parviendra-t-elle a vaincre sa timidité ? Du côté de Bettina, c'est l'horreur : la belle rousse tombe amoureuse du livreur de chez Nanouk Surgelés qui est … terriblement laid !
Ce qui frappe dans ces histoires, c'est la justesse et la profondeur de l'univers créée par Malika Ferdjoukh, brillamment mis en image par Cati Baur dont les dessins sont jolis et soignés, plein de couleurs douces ou flashy et girly, riches de détails rigolos. Chaque sœur possède son propre caractère mais sans caricature. C'est une sororité émouvante, soudée malgré des rivalités inévitables : « Être fille unique, j'aurais adoré. Puis je me rends compte que ça signifie cette chose affreuse : je me serais retrouvée orpheline à la mort de maman et papa, et alors j'ai un frisson ». (Hortense). Il règne à la Vill'Hervé beaucoup de douceur et de rires.
Une lecture 'doudou' ou 'bonbon' complètement de saison, que je recommande à tous, et qui me donne furieusement envie de lire Quatre sœurs de Malika Ferdjoukh !