"Les conséquences furent catastrophiques ; dès ce jour, le destin de la famille Zinn se transforma tragiquement"
La Légende de Bloodsmoor de Joyce Carol Oates
Traduit de l'anglais (États-Unis) : A Bloodsmoor Romance
1ère parution : 1982
Le livre de poche (biblio) / 712 pages / 8,60 euros
Dans une interview, Joyce Carol Oates explique qu'elle considère Bellefleur comme une parodie de roman gothique et La Légende de Bloodsmoor comme une parodie des romans 'de mariage' du XVIIIème et XIXème siècle. Dans les 2 cas, il s'agit de romans qui se dévoilent au prix d'une lecture exigeante et qui contrairement à ce que je pensais, n'ont aucune continuité entre eux. Il s'agit seulement d'histoires familiales denses, empoisonnées par une malédiction et teintées de fantastique.
Pennsylvanie, fin du XIXème siècle.
Une narratrice omnisciente mais anonyme rédige la chronique de la famille Zinn, issue de la bonne société américaine dont les 5 filles sont à marier. Il y a Constance Philippa l'aînée, Malvinia la beauté fantasque, Octavia la sage, Samantha l'intellectuelle et Deirdre, l'enfant adoptée. Le destin de la famille Zinn est bouleversée lorsque Deirdre est « en plein jour enlevée sur les terres de la majestueuse demeure de ses grands-parents, le château historique de Kiddemaster » (p.11). Adoptée à 10 ans, Deirdre est solitaire, taciturne et mélancolique et ne fut jamais réellement acceptée par ses sœurs. Cette disparition inexpliquée et inconvenante jette le doute sur la réputation des autres sœurs et l'idée que leurs destins ne sont pas inéluctables.
En effet, JCO fait emprunter des chemins bien singuliers à Constance Philippa, Malvinia, Octavia, Samantha et Deirdre. Jeunes femmes des années 1880, elles découvrent qu'il existe d'autres voies d'accomplissment que le mariage, la maternité et le respect des convenances. La Légende de Bloodsmoor évoque ainsi les succès du spiritisme, la question du genre, le milieux des acteurs et des inventeurs … On croise même (rapidement) Edgar Alan Poe, Ralph Waldo Emerson et Mark Twain (ce qui semble être un gimmick récurrent dans les œuvres de JCO). Pour autant, l'auteur reste très critique sur cette société américaine en construction car l'émancipation féminine n'est clairement pas synonyme de bonheur.
Comme Bellefleur, La Légende de Bloodsmoor possède un rythme qui lui est propre fait de répétitions et de retour en arrière, sur une période d'une vingtaine d'années. Cette construction donne un roman très délayé et un peu lassant d'autant plus que les sœurs ne sont pas très attachantes. Leurs péripéties sont certes étonnantes mais trop exagérées pour être crédibles. Ce que j'avais aimé dans Bellefleur (l'ambiance gothique hallucinante et les personnages fantasques) ne sont pas au rendez-vous ici.
Pour conclure, je garderai le souvenir d'un Pavé de l'été (organisé par BRIZE) difficile à lire et clairement pas mon préféré de JCO (que par ailleurs , tout le monde le sait, j'adore/j'admire/j’idolâtre).